Les spectacles sont aujourd’hui donnés au dessus d’un bassin de forme carrée, qui constitue la “scène”. L’eau est sombre, dans le but de dissimuler les mécanismes actionnant les marionnettes. Recouvertes d’une peinture brillante à base des pigments végétaux, celles-ci peuvent mesurer jusqu’à 50 cm de long et peser jusqu’à 11 kg. Leur vie n’excédant pas de trois à quatre mois quand elles sont utilisées en continu, leur fabrication occupe à plein temps plusieurs villages des environs de Hanoi.
Chaque représentation nécessite 11 marionnettistes, qui ont suivi une formation d’au moins trois ans. Plongés dans l’eau jusqu’à la taille, ils sont dissimulés derrière un écran de bambou. Ils portent des combinaisons qui leur évitent des maladies liées à leur longue présence dans l’eau.
Certaines marionnettes sont simplement fixées à de longues tiges de bambou; d’autres sont placées sur une base flottante, elle-même fixée à une tige. Elles ont pour la plupart des membres et une tête articulés, et parfois un gouvernail pour les diriger. Il peut y avoir trois tiges pour une seule marionnette et, dans la demi-pénombre, on a l’impression de les voir littéralement marcher sur l’eau. Les techniques complexes de manipulation des marionnettes, gardées secrètes par tradition, ne se transmettaient que de père en fils.
La musique a autant d’importance que l’action qui se déroule sur scène. L’orchestre se compose de flûtes en bois (sao), de gongs (cong), de tambours (trong com), de xylophones en bambou et du dan bau, un étonnant instrument à une seule corde dont la caisse est taillée dans l’écorce séchée d’un concombre chinois, le bau. Une tige souple en bambou, fixée à une extrémité de la caisse, modifie la tension de la corde, produisant des sons étranges et obsédants.
Le spectacle se compose d’une succession de tableaux évoquant aussi bien des scènes de la vie quotidienne que des légendes expliquant les origines de divers phénomènes naturels et sociaux, de la formation des lacs à celle des Etats. Une scène mémorable représente la culture du riz, où la pousse du riz ressemble à un film en accéléré et où les scènes de récolte sont à la fois frénétiques et gracieuses. Un autre tableau, décrivant la bataille entre un pêcheur et sa proie, est si réaliste qu’on a l’impression que le poisson est vivant. On verra aussi des dragons crachant le feu (feu d’artifice), une course poursuite entre un jaguar, une troupe de canards et leur gardien, et un garçon jouant de la flûte sur le dos d’un buffle.
Le spectacle composé de chants, de musique et d’explosions de pétards soulignant les moments forts de ces histoires enchantées, est divertissant et l’eau met merveilleusement l’intrigue en valeur, en permettant aux marionnettes d’apparaître et de disparaître comme par magie.